CR de Jean-Michel – Moulin-Neuf (Ariège) – le 18/12/2025 – menée par Christine B.
Au XIIIème siècle, le village de Cazals-des-Faures entre dans la seigneurie de Mirepoix, qui correspond à l’ensemble des terres données à Gui de Lévis, bras droit de Simon de Montfort. Dès 1534, les Lévis, seigneurs de Mirepoix, choisissent ce lieu afin d’implanter des «moulins neufs ». Le pluriel vient du fait que l’équipement comporte trois meules. C’est un moulin banal que les habitants ont l’obligation d’utiliser contre redevance au seigneur. En 1851, une quatrième meule est autorisée. La chaussée construite sur l’Hers détourne l’eau par un canal d’amenée jusqu’au moulin. Après usage, elle est restituée par le canal de fuite. Entre temps, elle entraîne la meule tournante qui, placée au-dessus de la meule dormante, immobile, écrase les grains. La mouture est triée en passant dans des tamis cylindriques, appelés bluteries. C’est en 1876 que la commune adopte le nom qu’elle porte aujourd’hui en remplacement de Cazals-des-Faures. Sachant que le hameau de Cazals-des-Faures fait partie de la commune de Moulin-Neuf, qui a donc changé de nom.
S’il en est une qui ne change pas, c’est bien l’adorable Christine B. En effet, cela ne fait pas moins de trois fois qu’elle nous propose Moulin-Neuf, sans succès (tourne, tourne petit moulin…). En effet, chaque fois, une météo capricieuse et pluvieuse a entrainé une annulation. La quatrième tentative sera-t-elle la bonne ? Ouf, cette fois nous y sommes ! Encore un peu et on se retrouvait à Moulin…Vieux. Confucius disait : « Confronté à la roche, le ruisseau l’emporte toujours, non pas par la force, mais par la persévérance ».
Nous sommes 8 (6 Marquises, 2 Comtes) sur le parking de la voie verte (derrière l’école et la mairie), à enfiler nos chaussures. La guide arbore le sourire des vainqueurs en donnant le signal du départ, malgré le brouillard ambiant. Rapidement une belle montée nous propulse à Cazals des Faures où se joue entre les habitants une sévère compétition afin d’élire la maison la mieux décorée. On pourrait surnommer ce hameau le village du père Noël. Imaginez trente pères Noël (pas moins) qui grimpent aux façades, envahissent les terrasses et colonisent les jardins.
Pendant que nous admirons ce spectacle, Christine, qui n’a jamais cessé de croire au père Noël, implore les cieux de chasser le brouillard. Comme c’est son jour, peu après, le vent fait tourbillonner les nuages et soudain, miracle, le soleil inonde toute la chaîne des Pyrénées enneigées. Au-dessous des nombreux pics, les pentes et les vallées s’azurent d’un bleu avec des nuances pâles. Nous sommes face à un tableau qui retient toute notre attention car, de plus, au premier plan, se dressent les tours du château de Lagarde dont la noirceur tranche avec le vert lumineux des prairies. La guide jubile. Les scientifiques sont formels, prendre le temps d’admirer la nature, le ciel, les nuages, permet au cerveau de se détendre, de récupérer et de fonctionner plus efficacement par la suite.
A Tréziers, nous faisons le tour de l’église Saint-Martin rénovée à la perfection, avant de plonger dans un joli chemin enherbé qui zigzague le long d’un ruisseau à sec. La montée au village de Lagarde est éprouvante. Certains profitent de la présence d’une autochtone et sa béquille pour souffler et obtenir des informations sur le château. Comme il n’est pas loin de midi, la guide propose des tables, au soleil, avec une vue imprenable sur les Pyrénées enveloppées d’une légère brume. L’arrêt repas est délicieux.
Nous sommes au pied du château de Lagarde qui s’appelait autrefois « La garde de Mirepoix ». Propriété des seigneurs de Lévis à partir du XIIIe siècle, le château évolue au fil du temps dans sa destinée et son apparence. Au XIVe siècle, François de Lévis fait reconstruire un château sur le bâti primitif. Il reste de ce temps, la tour portière fortifiée, la base des tours carrées, la salle des gardes, l’habitation du portier et des courtines. Un pont-levis et sa herse défendaient l’accès. A la Renaissance, la place forte défensive devient résidence de prestige, sous l’autorité de Jean V de Lévis, personnage de premier plan auprès de Louis XII et François Ier. Il a modifié le château au niveau de la cour, percé des fenêtres, élevé les tours carrées, construit une chapelle et une galerie et surtout érigé la tour de l’escalier en vis à jour. Au XVIIe siècle, Louise de Roquelaure, épouse puis veuve d’Alexandre de Lévis, lance de grands travaux. Elle fait modifier le haut des bastions, ériger de colossales statues sur les bastions et la tour d’escalier, créer la grande esplanade ceinturée de balustres à main courante, ouvrir des baies à balcon. Louise de Roquelaure lance aussi un projet de jardin à la française, avec arbres remarquables, bassins, massifs et statues. Devant ces ruines… on a peine à croire qu’il fut appelé « le Petit Versailles des Pyrénées », 236 personnes pouvaient y résider en même temps durant la deuxième moitié du XVIIe. Grandeur et décadence, depuis juillet 2024, le château est à vendre. En fait, le propriétaire est prêt à l’offrir gratuitement à celui qui en veut… vraiment. Avis aux amateurs.
Le redémarrage s’effectue sur le GR7, qui va du Ballon d’Alsace jusqu’à Portella Blanca en Andorre, sur près de 1537 kilomètres. Le sentier est tout simplement remarquable. C’est un vrai bonheur. Plus loin, nous déambulons dans les rues de Roumengoux. Un point de vue avec une table d’orientation nous permet de passer, une fois de plus, en revue les sommets, du massif de Tabe (Soularac 2368m, Saint-Barthélémy 2348m, Han 2074m, Fourcat 2001m) et du massif des Trois Seigneurs (Montcalm 3077m, Pique Rouge de Bassiès 2676m, Pioulou 2166m, Trois Seigneurs 2199m). Nous visitons ensuite la petite église ornée de remarquables vitraux contemporains, œuvre du peintre Hervé Cornu qui demeure au village.
Nous attaquons maintenant la descente vers Moulin-Neuf. Geneviève nous fait remarquer que le circuit n’est pas balisé de manière traditionnelle. C’est très juste. On trouve en effet, depuis le départ, des sparadraps roses… sur les pylônes, piquets et autres arbres du parcours. Après réflexion, il n’est pas anormal qu’une présidente soit une spécialiste des adhésifs lorsqu’on est… responsable des adhésions. Pour tout dire, ça lui colle un peu à la peau. Le décollage…, pardon l’atterrissage se fait en douceur sur la voie verte de Moulin-Neuf. Christine, qui a enfin réussi son pari et qui de plus a fait un sans-faute, se voit chaleureusement félicitée après une très belle rando ensoleillée de 18km pour 470m de dénivelé. Impossible dés lors de se quitter sans prendre le verre de l’amitié pour cette dernière rando de l’année. Ce sera chose faite sur la belle place de Mirepoix, en terrasse, au soleil et dans la bonne humeur. A propos des fêtes de fin d’année, proposition est faite de ne pas exagérer sur la bûche et autres chocolats, mais autant mettre… un sparadrap sur une jambe de bois.
Jean-Michel

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