CR de Jean-Michel – Etang de Peyregrand (Ariège) – le 16/10/2025 – menée par JM.

CR de Jean-Michel – Etang de Peyregrand (Ariège) – le 16/10/20254 – menée par JM.

La vallée de Siguer est une ancienne vallée glaciaire, elle conserve ses formes caractéristiques : des flancs pentus et des fonds étroits, avec des cols à des altitudes élevées. Enclavée par de hautes montagnes, cette vallée est un lieu de passage : muletiers, porteurs, migrants, contrebandiers et, pendant la dernière guerre, des passeurs avec leurs candidats à l’évasion. Au VIIIème siècle, la vallée de Siguer fut le théâtre sur le plateau de la Unarde, à 2250 mètres d’altitude, de l’affrontement des soldats francs de Charlemagne avec les armées sarrasines. Les objets recueillis en ce lieu (un scramasaxe, des poignards, des épées…) témoignent de cet épisode historique. Bien plus tard, alors qu’il a assis sa domination sur le piémont nord pyrénéen, Fébus souhaite profiter des terres du Siguer pour deux raisons : essayer de s’approprier l’Andorre toute proche (puisqu’il en était déjà le coprince, mais il n’obtint pas gain de cause) et aussi, comme il était fin chasseur, traquer l’ours et le loup présents dans la vallée.

Arrivés au parking de Bouychet (un peu au-dessus de Siguer), 9 Floripèdes (5 oursonnes, 4 louveteaux) enfilent leurs chaussures dans une atmosphère un peu fraiche, mais avec une météo prometteuse. Il est 8h45, lorsque nous attaquons le premier raidillon dans une hêtraie parsemée de buis. Rapidement le bruit du torrent nous accompagne dans notre ascension, mais pas que. En effet, un oiseau, que personne n’est capable d’identifier, s’amuse à jouer avec nous puisqu’il nous précède, mais sans que l’on puisse apercevoir son plumage. A moins qu’il ne s’agisse d’un dahut volant ?!

Plus haut, sur un petit pont de pierres, nous apprécions les cascades du ruisseau au milieu d’un décor de roches et d’arbres au feuillage sublime. Les couleurs d’automne sont bien présentes et nous avons l’impression d’assister à un concours de beauté qui se déroule devant nos  yeux émerveillés. Le camaïeu de couleurs du jaune en passant par l’ocre, le rouille et le rouge est divin. Le guide propose de laisser aujourd’hui de côté la performance, afin de contempler dame nature jusqu’à l’excès.

Après de multiples virages, le spectacle est encore plus beau. La vallée s’ouvre sur une estive avenante avec  un soleil qui nous aveugle par sa puissance et nous oblige à un arrêt « lunettes de soleil » indispensable pour tous. Nous déambulons sur un sentier enherbé qui traverse la jasse de Brouquenat. Pour info, une jasse est un espace herbeux autrefois utilisé comme enclos de nuit pour les troupeaux (c’est aussi une bergerie, ou bien encore un fromage…). Peu après, un chemin de rochers nous fait travailler l’équilibre, au milieu de rhododendrons dont certains sont encore en fleur.

Nous longeons l’étang  de Brouquenat d’en haut qui est  peu profond. Les rives sont marécageuses et envahies d’herbiers. Nous pouvons apercevoir une cabane surmontée d’une drôle de cheminée. L’une d’entre nous est persuadée qu’il s’agit d’une boîte aux lettres (!). Le guide propose aussitôt à la troupe de s’alimenter, de s’hydrater et de mettre une casquette ou un chapeau…Il est possible aussi que l’altitude soit à l’origine des premiers vertiges.

La dernière partie de la montée est très exigeante et des cairns bien positionnés permettent de se repérer au milieu des amas de roches. Arrivés à l’étang de Peyregrand, c’est un  panorama de toute beauté qui s’offre à nous. C’est sauvage et très beau. Nous sommes seuls. La magie du lac nous offre un paysage où le visible se noie dans la profondeur des eaux. Quel spectacle ! Comme il est 13 heures, rapidement nous nous installons confortablement sur la berge, afin de casser la croute avec une vue imprenable. Pendant le repas, chacun donne libre cours à ses appréciations. Les superlatifs sont nombreux. Odile (inscrite la veille à 22h55 par son secrétaire particulier…) répète à l’envi « mais que c’est beau ! », le serre file (impeccable dans son rôle) dit même qu’il s’agit d’une rando qui « friiiiise » la perfection.

Ce lac est entouré par de grands herbiers immergés. Il se situe sur le flanc est du Pic des Redouneilles (2 485 m), dans un vallon qui conduit au Port de Siguer. Légèrement plus haut à l’ouest, se trouvent les étangs des Redouneilles des vaches et des Redouneilles des brebis. L’étang de Peyregrand envoie ses eaux par une conduite souterraine vers le barrage de Gnioure. D’une superficie de 3 hectares, c’est un site prisé par de nombreux pêcheurs. On y observe des truites fario, des saumons des fontaines et des vairons.

Le redémarrage s’effectue tranquillement et avec une certaine prudence car le fait d’enjamber certains rochers requiert  de faire preuve d’un grand équilibre. Lorsque la situation l’impose ces dames se mettent même en mode « toboggan »… La longue descente sollicite les genoux et il se dit même (mais chut !) que quelques pirouettes de haut niveau sont  exécutées avec une grande élégance, mais sans la moindre gravité. L’arrivée aux voitures (après avoir parcouru 14,5 km pour plus de 1000mètres de dénivelé) se fait dans la joie et la bonne humeur.

A Tarascon, le guide du jour offre un rafraichissement, mais c’est bien le moins qu’il puisse faire car,  de nombreux progrès sont à réaliser : en ornithologie (ce drôle d’oiseau s’est montré incapable d’identifier le chant d’un oiseau entendu en début de rando), en géologie (impossible pour lui de qualifier une roche de couleur blanche), en psychologie (pourquoi recommander aux dames de se déshabiller ou de se rhabiller sans cesse ?), en philosophie (le garçon semble obsédé par la contemplation de la montagne).

Dans son livre « Marcher, éloge des chemins et de la lenteur », David Le Breton écrit : « Le randonneur renoue avec une certaine innocence, ce sont des émerveillements d’enfance qui le saisissent à nouveau, et lui, dont la vie quotidienne est souvent si chargée de tâches à accomplir, s’arrête ici pour de longues contemplations des animaux, des plantes ou des paysages, comme si l’éternité était avec lui ».

Jean-Michel

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