CR de Jean-Michel – Laurac par Laurabuc (Aude) – le 5/12/2024 – menée par René.
Une pointe du jour rougissante accueille 15 Floripèdes (8 comtesses, 7 sénéchaux) sur le parking situé en contrebas de Laurabuc. Plus précisément au calvaire, qui est une étape sur le sentier des collines du vent, un linéaire de 48 km qui joint Fanjeaux à Avignonet-Lauragais. Très joueur, René, le guide du jour qui ne craint aucune motion de censure…, nous promet Laurac, et…nous fait démarrer à Laurabuc. Bref, il a très bien réussi son coup avec son brouillage de pistes. En effet, d’aucuns cherchent le truc, certains flairent le bug, d’autres encore s’imaginent rallier Laurac en bus…!
De plus, et c’est assez inédit, il décide de commencer la journée par un chemin de croix…C’est donc en procession sur le chemin de l’espérance, avec (ou sans) passion, que nous grimpons au milieu des pins et des chênes verts. Nous effectuons quelques stations…, afin d’admirer une lumière rasante et jaune qui éclaire la douce pierre des maisons alentours. Le spectacle est grandiose. Peu après, l’arrière-garde admire trois magnifiques chevreuils mâles, à l’arrière train décoré par une zone de poils blanche en forme de haricot (sachant que pour la femelle la tache blanche est en forme de cœur).
Nous empruntons de beaux chemins enherbés qui nous conduisent à la terre promise… par le guide. Le village de Laurac le Grand, qui a donné son nom au Lauragais, présente le plan circulaire d’un castrum type avec des ruelles entourant l’église qui occupe le point le plus haut. C’est le plus beau castrum cathare du coin. Cette église (fermée pour cause de travaux) est gigantesque. Il s’agit d’un bâtiment prestigieux de la Reconquête catholique comme à Fanjeaux, Saint Félix ou Avignonet. Celui-ci occupe vraisemblablement l’emplacement du château du XIIème siècle aujourd’hui disparu.
Au début du XIIIème siècle, la seigneurie de Laurac est très puissante. Elle a, à sa tête, Aimery de Laurac et de Montréal, l’un des seigneurs les plus importants de la région. En 1211, le terrible Simon de Montfort s’empare du village qui abritait des communautés cathares. Plus tard, Catherine de Médicis (née en 1519 à Florence et morte en 1589 à Blois) hérite du comté qu’elle érige en Sénéchaussée Ducale en 1551, puis en Sénéchaussée Royale.
Quelques curiosités sont à découvrir dans ce village, parmi elles, on peut citer, outre l’église Saint Laurent du XIIIème siècle, la Porte Saliège qui gardait l’une des entrées du village, un mur très ancien appelé « le mur de Blanche », portant le souvenir pathétique de Blanche de Laurac, seigneuresse du lieu et haute figure du catharisme Lauragais, quelques restes de remparts, les silos à grain du moyen-âge…Dans les archives, est également mentionné le Pech de Malemort où se dressaient trois gibets, car le seigneur de Laurac disposait des droits de justice, haute et basse.
Sous la protection de la légion…, nous quittons ce très beau village par des chemins enherbés de toute beauté, mais cela ne dure pas. En effet, à Trabalo, le guide, qui décidément s’amuse beaucoup, nous fait emprunter un court sentier qui nous oblige à lever haut nos pieds afin de pouvoir éviter de nombreuses ronces particulièrement traîtres. Dans une grimpette, nous croisons un groupe de randonneurs de Montréal, identique au nôtre : la même tchatche et le même accent. Il est composé uniquement de… jeunes !
A l’orée du bois, nous sommes face à un panorama remarquable, avec au loin le village de Villasavary, le Bugarach et le Pic de Madres (2468 m). Ce dernier, qui est le point culminant du département de l’Aude, est manifestement bien connu des montagnards du groupe. Peu après, tout en haut de la crête, nous avons le bonheur d’observer d’un côté, une très grande partie de la chaîne des Pyrénées enneigée (l’hiver serait-il arrivé ?), et de l’autre la baillie, visitée ce matin, ramassée autour de son église. Nous voilà au Puy de Faucher, un ancien pilori. On y apprend qu’au moyen âge, les justiciables étaient ici condamnés au fouet, au carcan (collier métallique placé autour du cou, ou dispositif en bois avec des trous pour la tête et les mains, aux fins d’exposition), aux galères ou à la mort.
En ce qui nous concerne, ce n’est pas la galère ! Nous sommes éloignés du carcan familial, normalement les colliers de ces dames sont loin d’être des instruments de torture et, comme selon le dicton, il ne sert à rien de fouetter l’âne affamé…, le guide magnanime nous condamne simplement à un sympathique arrêt casse-croûte. Pour cela, il nous propose un talus ensoleillé, à l’abri du vent avec une vue imprenable sur Laurac, la plaine Audoise avec au loin la montagne noire.
Lors du redémarrage qui suit le dessert, le Cers sert à nous faire descendre plus vite sur une piste verte et agréable. Nous arrivons très rapidement à Laurabuc (et non pas à Balaruc, comme a pu le dire l’une d’entre nous). Nous entrons dans l’Église saint pierre saint Paul, au plafond en mauvais état. Une paroissienne, qui restaure les statues, nous indique que, même si nous sommes sous la protection du tout puissant, la chute de morceaux de plâtre sur notre tête est du domaine du possible. Elle nous explique par ailleurs qu’il s’agit d’un ancien château transformé en église. Sous le chœur, il y a une crypte avec un magnifique tableau (représentant trois apôtres) qui aurait besoin d’être restauré.
Après avoir déambulé dans ce minuscule hameau aux rues portant des noms pas très compliqués à retenir (rue de la prison, rue du moulin, rue de la mairie, rue de la beauté…), c’est en beauté que nous terminons notre magnifique rando de 18 km, pour un dénivelé de 450m. Toutes nos félicitations à notre guide qui a composé de toutes pièces cet itinéraire, en compagnie de sa dame. De plus, il ne s’est jamais trompé, alors qu’il n’y avait pratiquement aucun repère le long du parcours. Ce dernier point est quand même un comble, car nous avions aujourd’hui la chance d’avoir parmi nous l’équipe « balisage » au grand complet. Un pot dans l’autre capitale du cassoulet permet de conclure cette très belle journée.
Pour terminer, revenons un instant à Catherine de Médicis, notre Comtesse de Lauragais. Voici un extrait de l’éloge funèbre de cette grande figure du XVIème siècle et du royaume de France (associée toutefois à une légende noire) : « Humiliez vos cœurs devant Dieu, vous qui êtes Français, reconnaissez que vous avez perdu la plus grande reine en vertu, la plus noble en race et génération, la plus excellente en honneur, la plus chaste entre toutes les femmes, la plus prudente en son administration, la plus douce en sa conversation, la plus affable et la plus bénigne à tous ceux qui ont voulu l’aborder, la plus humble et la plus charitable envers ses enfants, la plus obéissante à son mari… ». Mais, tout ceci ne saurait faire oublier sa citation la plus célèbre : « La première leçon que j’ai apprise a été de ne jamais attendre le secours d’un homme ».
Jean-Michel
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