Le point de départ de la rando promise à Puycelsi se situe… au centre du village de Larroque blotti sous sa falaise ocre percée de grottes naturelles. Le sentier de Mespel offre un raidillon bordé de fragiles violettes aux 19 Floripèdes à qui Ghislaine, la guide du jour, promet un somptueux point de vue sur la vallée. Mais, arrivés en haut, on voit bien que la promesse ne peut être tenue. En effet, le brouillard cache l’horizon et se joue de notre raison.
Plus haut, les brumes se dissipent lorsque nous rejoignons le GR 46 (qui va de Tours à Toulouse), que nous ne suivons que très peu de temps afin de pouvoir admirer la petite chapelle de Notre-Dame des Bois et son minuscule cimetière. Le sentier qui suit grimpe dans la forêt de Grésigne au milieu des scilles à deux feuilles (petites fleurs de couleur bleue), du fragon qui n’arbore que quelques boules rouges, avec en fond sonore le délicat chant des oiseaux.
Ghislaine, aussi joueuse que taquine, nous entraîne vers un nouveau point de vue qui se transforme finalement en un point le plus haut de la forêt (468 mètres) avec vue… sur les arbres. Les naïfs (dont fait partie votre serviteur) se retrouvent donc « comme des glands » au milieu d’une forêt, face à un chêne (certes atypique) proche d’une borne. Philippe et Michel trouvent que la guide dépasse les bornes…
Voulant à tout prix se rattraper, Ghislaine nous arrête 50 mètres plus loin afin de nous faire admirer, enfin… un vrai panorama : Puycelsi sur son piton enroulé dans une écharpe de brume. A partir de cet instant non seulement elle est immédiatement pardonnée mais aussi ovationnée.
Nous descendons dans la vallée de l’Audoulou au milieu des cornouillers mâles, des délicates pervenches, des taillis de châtaigniers et des perchis de chênes. Midi arrivant, le repas est pris sur un amas de pierres moussues, en pleine forêt. Le redémarrage s’effectue sur une petite sente qui nous conduit à une jolie cascade dans un décor un peu fantasmagorique et une succession de jolis petits ponts de bois. La suite est un peu compliquée, c’est un festival de boue où chacun essaie de rester… debout. Quelques dames poussent des ouh ! houh ! sans doute pour conjurer le sort, au risque d’effrayer le loup de l’Audoulou.
La suite est un enchantement. Le sentier zigzague dans la vallée sous la protection, tout là-haut, de l’église de Puycelsi qui nous promet un raidillon final de folie. Rien n’y fait, en moins de deux nous voilà sous les remparts. L’entrée triomphale de la troupe, qui a vaincu cette rude montée, passe par la Porte de l’Irissou de ce village très convoité qui, au cours des décennies, ne fut jamais pris de force. Il fut assiégé, en particulier, par Simon de Montfort durant la croisade des Albigeois (1211-1213), puis par les Pastoureaux (groupes de paysans voulant chasser les Infidèles) en 1320, enfin par les Anglais en 1386 (guerre de cent ans). Pour l’anecdote, lors du siège des Anglais, les Puycelsiens auraient fait crier chaque jour leur unique cochon à l’aide d’une lance, simulant ainsi une abondance de ripaille.
Nous déambulons ensuite dans les passages étroits et presque secrets, les venelles, le chemin de ronde, les portes fortifiées… Indéniablement, Puycelsi a conservé le charme et le mystère des bastides médiévales. On a le sentiment de remonter le temps. Un preux chevalier déboulerait son épée à la main, on ne serait guère surpris. L’église Saint Corneille arrête nos pas.
Le retour vers Larroque, après un circuit de 17 km, 625 mètres de dénivelé, avec un sans-faute de Ghislaine (un grand bravo à elle), se fait sous un magnifique ciel bleu et dans une grande douceur printanière.
Nous revenons à Puycelsi, cette fois-ci en voiture, afin de nous rafraîchir à la terrasse d’un café, avec une vue… garantie, où les adorables Claudine et Mireille nous offrent la tournée (même si la date de leur anniversaire est passée) et où nous retrouvons Jean, que nous avions chargé de nous garder les meilleures places…mais qui finalement avait trouvé plus sympathique de déambuler dans les ruelles…
Il est vrai que nous sommes dans l’un des plus beaux villages de France, dans un écrin de verdure de toute beauté, sur un site exceptionnel où les pierres ont une âme, au cœur d’une citadelle imprenable, bref un lieu idéal pour une randonnée.
Et puis celle-ci… qu’est-ce qu’elle est belle !
Jean-Michel
C’est toujours un plaisir de te lire: tes récits brillants empreints de tonalités
joyeuses me ravissent. Merci Jean-Michel.
Nicole C.